La 20e Biennale de la danse à Lyon va bientôt commencer en fanfare (du 9 au 30 septembre). Après une édition 2021 décalée et tronquée, voilà qu’elle retrouve sa place d’antan sur le calendrier et ses trois semaines de festivités. De plus, pour la seconde fois de son histoire, cet événement qui fait rayonner la ville jusqu’à l’autre bout de la planète s’ouvre par le célèbre Défilé.
Véritable rituel d’agglomération, cette parade est un marqueur de la Biennale dans son ensemble qui l’ouvre à un très large public, le plus souvent absent des salles de spectacles. Outre le défilé, que l'on recommande, quatre propositions ont retenu notre attention.
Qudus Onikeku et sa fratrie d'artistes
Afropolis : Out of this World est une proposition fleuve. Portée par le chorégraphe nigérian Qudus Onikeku, elle réunit un collectif d’artistes, de chercheurs et chercheuses qui réfléchissent le monde pour sortir des logiques omniprésentes de hiérarchisation, d’exploitation et de colonisation imposées par l’homme blanc.
Après deux éditions à Barcelone et Marseille, voici que la tribu de Qudus Onikeku se transporte dans la capitale des Gaules pour une nouvelle immersion dans un espace inhabituel, un monde de fantômes et d’utopie, qui permette d’inventer de nouvelles sociétés. Et surtout de se réapproprier un monde asservi par le capitalisme blanc.
Les 23 et 24 septembre aux Usines Fagor.
Le monde enchanté de Lia Rodrigues
Lia Rodrigues revient en majesté avec sa dernière production, Encantado qu’elle avait présentée au festival d’automne 2021, dans le cadre du portrait que le festival parisien lui avait consacré. Le spectacle dont le titre se traduit par "enchanté", un mot qui revêt d’autres significations au Brésil, convoquant les esprits de la nature, a été créé dans le contexte de la crise sanitaire.
Il cherche à réenchanter le monde et "désamorcer la terreur" dans une joyeuse sarabande de corps nus s’emparant de couvertures chamarrées. Comme toujours la chorégraphe, installée dans la favela de la Maré à Rio de Janeiro, délivre un propos à la fois poétique et politique.
Les 29 et 30 septembre à la Maison de la danse.
La touche Guedes déjà présente pour la Biennale de la danse 2023
C'est une Biennale de transition puisque conçue pour moitié par l’ancienne directrice partie aux olympiades, Dominique Hervieu, et le nouveau directeur, Tiago Guedes. Mais elle porte tout de même la griffe de son nouveau directeur, plus inclusive, plus audacieuse et surtout plus engagée. Notamment grâce à des diversités d’esthétiques et d’échelles.
On le voit très nettement dans le choix des propositions faites aux usines Fagor, occupées chaque week-end pendant la manifestation par des "immersions" mais aussi par des spectacles atypiques telle la première création de Boris Charmatz pour le Tanztheater de Wuppertal, Liberté Cathédrale ou celle de la jeune chorégraphe uruguayenne Tamara Cubas qui ont en commun de réunir beaucoup de danseurs et danseuses sur scène.
Car ce qui saute aux yeux, c’est également le soutien notable à la création chorégraphique avec pas moins de 21 premières françaises. Et aussi, la part belle aux pratiques amateures et aux croisements des artistes et du public avec les traditionnels cours de danse à la Part-Dieu mais aussi l’immersion Ballroom, l’immersion hip-hop et le club Bingo qui fera bouger les corps jusqu’à 2 h du matin !
Billetterie ouverte sur labiennaledelyon.com.
Anne Teresa de Keersmaeker et Meskeren Mees : jeunesse et ivresse
Vue à la Fabrica dans le cadre du festival d’Avignon cet été, la dernière production de la grande dame de la danse flamande, Anne Teresa de Keersmaeker, EXIT ABOVE after the tempest est tout à fait surprenante. Si l’on retrouve les motifs chers à la chorégraphe, la marche et les grandes traversées, il y a ici un élan frondeur pas si fréquent dans son travail, comme si elle avait absorbé et magnifié la jeunesse de sa troupe.
A l’instar de la vitalité et la rage de la jeune autrice-compositrice-interprète qui co-signe la bande-son avec Jean-Marie Aerts, Meskeren Mees. Inspiré à la fois de La Tempête de Shakespeare et du titre du chanteur de blues mythique Robert Johnson, Walking blues, ce spectacle emporte par sa fougue et son intelligence.
Du 20 au 21 septembre à l'Opéra de Lyon.
Phia Ménard : une artiste sans concession
On avait adoré sa Maison Mère, premier volet de la trilogie des Contes immoraux que le public pourra voir à la Maison de la danse en début d’année prochaine et on attend avec impatience la nouvelle production de Phia Ménard, ART. 13.
Coproduction de la Biennale et premier opus du Cycle des jardins et des ruines, ART.13 orchestre "une rencontre-combat entre une femme et un jardin à la Française" en prenant appui sur l’article de la déclaration universelle des droits de l’homme qui garantit à tous et toutes la libre circulation (sic).
Artiste iconoclaste et pluridisciplinaire, elle cherche à déboulonner les fondements du patriarcat par l’imaginaire et l’absurde. ART.13 ne devrait pas déroger à la règle et c’est tant mieux !
Du 17 au 19 septembre au théâtre des Célestins.
